Le Costa Rica, le plus petit pays d’Amérique centrale abritant 5 millions d’habitants accueille 3 millions de touristes par an. Ils sont attirés par ce havre de paix au sein d’une région souvent agitée. Et par une séduisante plongée au royaume de la biodiversité. À chacun(e), son oiseau, sa fleur ou son animal fétiche. Il n’y a que l’embarras du choix.
Nous laissons derrière nous la capitale, San José, et ses allées de tabebuias aux fleurs mauves. Le ciel azur est obscurci par les fumerolles en provenance du volcan Poas. Mais c’est vers un autre volcan actif, l’Irazu, culminant à 3432 mètres que nous nous dirigeons. À l’approche du sommet, des dépôts de cendres voisinent avec des parterres de gunneras, surnommées les parapluies du pauvre.
Une faune abondante
Bientôt, une odeur de soufre emplit l’atmosphère et l’on découvre dans un paysage lunaire le vaste cratère principal de 1050 mètres de diamètre. Profond de 300 mètres, il abrite un lac acide aux eaux bleutées. Les terres agricoles environnantes, hier dévastées par les éruptions, ont tout de même été fertilisées par les projections de cendres riches en minéraux. Les contreforts du volcan accueillent à présent des plants de caféiers d’altitude dont on tire un nectar réputé. Au bord des routes, échoppes et marchands ambulants proposent fruits et légumes en abondance : avocats, mangues, pommes de cajou…
Le paysage vallonné débouche en contrebas sur la ville de Cartago, dominé par la silhouette imposante de la basilique Notre-Dame des Anges, de style néo-byzantin. Elle abrite « la Negrita », une vierge noire aux traits d’Amérindienne. Devenue la sainte patronne du Costa Rica, elle fait l’objet d’un pèlerinage populaire, transformant la cité en Lourdes de l’Amérique centrale.
Costa Rica, le paradis des oiseaux
Alentour, un manteau verdoyant tissé de sous-bois et de canopées recouvre le paysage. Le pays, grand seulement comme la Bretagne et la Normandie réunies, n’a pas lésiné sur les mesures : forêts protégées, parcs nationaux et aires de conservation s’étendent sur un quart de sa superficie. Autant dire que dans ce milieu naturel favorable prospèrent une flore et une faune d’une richesse remarquable. D’innombrables variétés d’orchidées attirent le regard, tout comme les champs d’amaryllis, les alpinias ou les roses de porcelaine.
Dans la région Pacifique central, les oiseaux s’en donnent à cœur joie. Des toucans au bec multicolore s’envolent de branche en branche dans le parc Guayabo. Plus loin se font entendre les piaillements du tyran quiquivi, joli passereau à ventre jaune, avant que se pose devant nous un pic vert à tête rouge.
Un couple de aras survole la rivière Tarcoles, où déambulent tranquilles, mais attentifs aux nombreux crocodiles, spatules, hérons et autres pélicans. Du côté de San Gerardo de Dota, des colibris multiplient les battements d’ailes et font étalage de leurs prouesses en matière de vol stationnaire.
La traque du quetzal
La traque du quetzal réclame plus de patience. Levé dès potron-minet, nous rejoignons, comme des dizaines de touristes venus du monde entier, un lieu où des nids creusés dans des troncs ont été repérés. Longues-vues et zooms sont vite mis en position. « Silence ! », intiment les guides locaux au terme d’une demi-heure d’attente. « Attention, prévient l’un d’eux, en voilà un qui part nourrir ses petits ». La rareté sort en effet de sa cachette et nullement intimidée semble poser pour les photographes. Le quetzal resplendissant mérite bien son nom. Il arbore ses couleurs émeraude et rubis du plus bel effet face à la foule fascinée. Jadis, Aztèques et Mayas accordaient une haute valeur ornementale à ses plumes caudales et les utilisaient même comme monnaie. L’oiseau vénéré était en outre associé au culte du serpent à plumes, le dieu Quetzalcoatl.
Histoire de nous familiariser avec le milieu exubérant, nous entreprenons deux balades, l’une à cheval, le long du rio Savegre, l’autre dans la réserve Rainmaker. Là, nous progressons à la manière d’Indiana Jones, en franchissant une succession de ponts suspendus au cœur d’une végétation tropicale. En scrutant les bas-côtés, on décèle un lézard basilic, plus connu sous son surnom de Jésus Christ, car il a la capacité de courir sur l’eau… Nous saluons quelques grenouilles au corps bariolé dissimulées dans les feuillages. « Prudence, alerte Ivan, notre accompagnateur, ce sont des Dendrobates. Elles secrètent un venin toxique.
Hier, les Amérindiens s’en servaient pour empoisonner les flèches lancées de leur sarbacane ». Ailleurs, entre deux cascades, tout le loisir est donné pour entendre les cris rauques des singes hurleurs ou admirer – de loin – un paresseux, lové au sommet d’un arbre et forcément assoupi. « Il dort 14 heures par jour, renseigne Ivan, et il ne descend à terre qu’une fois par semaine ».
Costa Rica, l’atout nature
Si les dieux ont bien doté le pays en richesses naturelles, le Costa Rica ne bénéficierait pas d’un engouement touristique certain – 3 millions de visiteurs par an – sans une bonne dose de volontarisme politique. Déjà, au lendemain d’une brève mais sanglante guerre civile (plus de 2000 morts), le président vainqueur José Figueres (Don Pepe), dans un geste inédit, abolissait l’armée le 1er décembre 1948. De manière symbolique, la caserne de Bellavista était convertie en musée national. Plus tard, le fils de Don Pepe, José-Maria Figueres, accédait à son tour à la magistrature suprême, à 39 ans, et déclarait le 8 mai 1994, lors du discours inaugural de son mandat, que son pays porterait « le projet pilote d’un nouvel ordre écologique mondial ».
La biodiversité comme moteur de développement
Vision pionnière sans nul doute que de tabler sur la biodiversité comme moteur du développement. L’alliance avec la nature ne s’est pas démentie. Le « poumon vert » est choyé sur l’ensemble du territoire à l’aide de mesures conservatoires. Les écolodges ont prospéré dans la jungle. La sensibilisation à la cause écologique gagne du terrain. Ainsi, sur le littoral, une baleine composée de bouteilles de plastique a été érigée à l’entrée du parc national marin Ballena. Manière de rappeler que l’on a retrouvé dans les estomacs de baleines échouées des kilos de déchets et sacs en plastique. La stratégie gouvernementale de communication surfe sur cette tendance. L’omniprésent « Pura vida » (la vie pure), intronisé slogan officiel, est mis à toutes les sauces et si bien intégré par la population qu’il est répété comme un mantra, en guise de salutations… ou pour meubler une conversation !
La « Pura vida » a malgré tout ses limites. Parlez-en aux automobilistes pris dans les effluves nauséabonds des embouteillages de San José ! « Certes, admettent les autorités, mais la plus grande part de notre électricité est déjà issue d’énergies renouvelables (hydroélectricité, éolien, solaire, géothermie) » et « nous ambitionnons de supprimer toutes les émissions de CO d’ici à 2050 ». Rude défi en perspective. Il en est un autre d’une actualité plus immédiate : l’afflux de visiteurs ne peut-il compromettre la survie de ces espèces animales qu’ils sont venus admirer ?
Échos du passé
A San José, méli-mélo de gratte-ciel et de villas coloniales, les oiseaux ont également droit de cité. Des milliers de perruche ont envahi les arbres du parc central et rivalisent en termes de vacarme avec le trafic urbain. Mais des abris bienvenus attendent le visiteur. D’abord, le bâtiment le plus ancien, le théâtre national édifié en 1897 sur le modèle de l’Opéra Garnier de Paris.
Outre une salle à l’acoustique remarquable, on remarque une fresque au plafond évoquant la condition des employés à la cueillette du café et à la récolte des bananes. Tout près, en sous-sol, le musée de l’or précolombien expose quelque 2000 pièces d’orfèvrerie finement ciselées. Les animaux ont constitué la principale source d’inspiration des Amérindiens : des alligators à deux têtes rivalisent d’éclat avec crabes, grenouilles ou urubus. D’imposantes statues de Jimenez Deredia, le Botero local, parsèment les rues de San José. Autour du thème « la force et l’universalité de la sphère », l’artiste propose des sculptures voluptueuses intitulées « Gestation » ou « Rencontre », parmi 27 œuvres monumentales.
Quelques unes ont pénétré dans le musée de Jade. À l’aide de cette pierre semi-précieuse, les artistes d’antan ont élaboré amulettes et pendentifs. Ils sont présentés en compagnie de figurines en céramique où les chamanes occupent une place importante. Révérence obligée qui boucle le parcours : le chaman, prescripteur de médecines à base de plantes, toujours en quête d’un équilibre entre l’homme et la nature, n’était-il pas un écologiste avant l’heure ?…
Texte et photos Yves Hardy
Infos pratiques pour le Costa Rica
Y aller. Vols directs Paris-San José avec Air France
Y séjourner. À San José, le Marriot Hacienda Belenet le Grand hôtel, situé en plein centre ville.
– Dans la région Pacifique central, Le Macaw lodge , le Dantica Cloud forest lodge et le Cristal Ballena
Y déjeuner. Le restaurant Sikwa à San José, où Pablo, le chef cuisinier également anthropologue, revisite avec talent les savoirs et saveurs ancestraux.
Tél : (+ 506) 70 93 16 62
Guides. « Amérique centrale » (Bibliothèque du voyageur – Gallimard, 29,50 €), le plus récent (avril 2019) et le mieux illustré ;
le Lonely Planet Costa Rica (26,50 €) et le Petit Futé Costa Rica (13,95 €).
Renseignements. Institut costaricien du tourisme (ICT) représenté en France par l’agence Indigo, 4 bis rue Descombes – 75017 Paris
Tél : 01 40 28 10 00 www.indigofrance.com/