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Cela fait longtemps qu’elle est partie, qu’elle a quitté sa place, la passagère à la robe rouge, longtemps, trop longtemps. Une passante comme dans la chanson. Une femme dont l’histoire restera étrangère, qui laisse derrière elle le sillage de la nostalgie de la peau dont on n’aura pas connu le goût.
Un mot, lui écrire un mot qu’elle trouvera peut être dans ce livre qu’elle a abandonné sur la tablette. Il le fait, pour l’espoir fou, pour le temps qui passe et avale tout, pour la promesse d’un avenir à écrire, il écrit dans cette urgence qu’il s’est construite, quelques mots comme on lance une bouteille à la mer.
Anna est restée tout le voyage dans ce wagon restaurant. Elle est revenue prendre ses affaires : son sac sous le siège, le livre, a souri à cet homme qui ne cessait de la regarder, un peu gênée, souri comme une manière d’adieu et elle s’est mêlée aux passagers de l’allée.
Paris est gris comme à son habitude. L’hôtel de la Manufacture, c’est là qu’elle trouve refuge un peu plus tard, là qu’elle a réservé. Sobre et chic, comme elle aime ; elle range ses deux robes, se dit qu’elle fera les boutiques plus tard peut être, demain ou un autre jour, elle pose le livre sur la table de chevet alors elle voit ce mot d’Antoine, elle hésite un peu, quelques secondes, et puis elle appelle :
-« J’étais dans le train, tout à l’heure, vous m’avez laissé ce mot, je crois, enfin, je ne sais pas, il y a ce mot qui me dit d’appeler alors voilà… » Et le silence après. Elle tremble un peu. L’homme, de l’autre côté lui donne une adresse, c’est dans le Marais, oui, elle connait, dans une heure, d’accord. Il a la voix douce et grave. Il raccroche.
L’impression que tout peut arriver. Elle se regarde dans le miroir, met du rouge sur ses lèvres, se pince les joues, ça ira. Il est long le trajet en métro, trois stations, un changement, quatre stations de nouveau, enfin l’air libre.
Ils marchent longtemps dans les rues, sans trop bien savoir où aller. Se poser quelque part, ils n’en ressentent pas le besoin. Peut être que se voir de face comme ça leur semble prématuré, trop lourd aussi car dans l’obligation de se faire la conversation. Là ils parlent de ce qu’ils voient, de Paris, des rues, de leurs étonnements encore devant cette ville qui ne cesse de se donner à voir. Il est à peine plus grand qu’elle, Antoine, quelques centimètres tout au plus. Elle garde ses mains dans les poches de son manteau. Plus brune qu’il ne l’a vue, plus mate aussi, elle est belle, voilà ce qu’il se dit, il est fier de marcher aux côtés de cette femme qu’il ne connait pas. Ils croisent des gens, ont l’air d’un couple, un peu dans la distance, mais un couple tout de même.
A suivre…
Pour lire les précédents chapitres de Désirs Croisés :
Chapitre 1
Chapitre 2, Anna
© Aquarelle, Les amoureux de Notre-Dame de Patrick Pichon en vente sur son site
Désirs croisés, chapitre 3, Un petit mot…, une nouvelle de Dominique Mallié.
Après avoir croqué pendant un an notre société, l’amour, les hommes, le couple, les enfants… avec beaucoup d’humour, Dominique Mallié passe à un autre genre, la nouvelle à suivre chaque semaine sur les Boomeuses. Cette semaine le chapitre 3, de DÉSIRS CROISÉS à lire tous les mercredis.
Un petit mot …
Cela fait longtemps qu’elle est partie, qu’elle a quitté sa place, la passagère à la robe rouge, longtemps, trop longtemps. Une passante comme dans la chanson. Une femme dont l’histoire restera étrangère, qui laisse derrière elle le sillage de la nostalgie de la peau dont on n’aura pas connu le goût.
Un mot, lui écrire un mot qu’elle trouvera peut être dans ce livre qu’elle a abandonné sur la tablette. Il le fait, pour l’espoir fou, pour le temps qui passe et avale tout, pour la promesse d’un avenir à écrire, il écrit dans cette urgence qu’il s’est construite, quelques mots comme on lance une bouteille à la mer.
Anna est restée tout le voyage dans ce wagon restaurant. Elle est revenue prendre ses affaires : son sac sous le siège, le livre, a souri à cet homme qui ne cessait de la regarder, un peu gênée, souri comme une manière d’adieu et elle s’est mêlée aux passagers de l’allée.
Paris est gris comme à son habitude. L’hôtel de la Manufacture, c’est là qu’elle trouve refuge un peu plus tard, là qu’elle a réservé. Sobre et chic, comme elle aime ; elle range ses deux robes, se dit qu’elle fera les boutiques plus tard peut être, demain ou un autre jour, elle pose le livre sur la table de chevet alors elle voit ce mot d’Antoine, elle hésite un peu, quelques secondes, et puis elle appelle :
-« J’étais dans le train, tout à l’heure, vous m’avez laissé ce mot, je crois, enfin, je ne sais pas, il y a ce mot qui me dit d’appeler alors voilà… » Et le silence après. Elle tremble un peu. L’homme, de l’autre côté lui donne une adresse, c’est dans le Marais, oui, elle connait, dans une heure, d’accord. Il a la voix douce et grave. Il raccroche.
L’impression que tout peut arriver. Elle se regarde dans le miroir, met du rouge sur ses lèvres, se pince les joues, ça ira. Il est long le trajet en métro, trois stations, un changement, quatre stations de nouveau, enfin l’air libre.
Ils marchent longtemps dans les rues, sans trop bien savoir où aller. Se poser quelque part, ils n’en ressentent pas le besoin. Peut être que se voir de face comme ça leur semble prématuré, trop lourd aussi car dans l’obligation de se faire la conversation. Là ils parlent de ce qu’ils voient, de Paris, des rues, de leurs étonnements encore devant cette ville qui ne cesse de se donner à voir. Il est à peine plus grand qu’elle, Antoine, quelques centimètres tout au plus. Elle garde ses mains dans les poches de son manteau. Plus brune qu’il ne l’a vue, plus mate aussi, elle est belle, voilà ce qu’il se dit, il est fier de marcher aux côtés de cette femme qu’il ne connait pas. Ils croisent des gens, ont l’air d’un couple, un peu dans la distance, mais un couple tout de même.
A suivre…
Pour lire les précédents chapitres de Désirs Croisés :
Chapitre 1
Chapitre 2, Anna
© Aquarelle, Les amoureux de Notre-Dame de Patrick Pichon en vente sur son site
4 commentaires
Vous avez réussi à les rendre vivants ces deux là , et j’attends de leur nouvelle semaine après semaine , c’est un peu long une semaine entre deux chapitres, je trouve …
quelle jolie écriture ! vivement le recueil !
Trop bien!!! On se laisse emporter par l’histoire….
Quelques lignes pour se remettre dedans et hors d’un coup il faut attendre la suite!!! Mon Dieu que c’est dur de lire une si belle histoire par petits morceaux……. J’imagine la suite mais est ce que j’ai raison? Il va falloir que j’attende pour le savoir :/
Magnifiquement écrit, ça fait rêver.. je voulais attendre 2 ou 3 écrits pour faire plus long, mais impossible d attendre.
Si bien écrit que l’on se promène dans Paris avec eux!!! On se met à la place d’Anna et …. On attend la suite avec impatience !