La cinquantaine est souvent décrite comme le « sommet » de notre épanouissement, de nos séductions quasi intactes, du renouveau de notre jeunesse et d’une adulescence gentiment prolongée ! Mais, en bonne montagnarde que je suis, j’ai toujours constaté qu’après le sommet, on redescend… Sauf à viser un autre sommet, et encore un autre… Et jusqu’où et quand ? Ne devrait-on pas regarder les choses par d’autres bouts de nos lorgnettes de quinquas (ou jeunes « sexygénaires ») pour être vraiment en phase ?
Un exemple qui pose question, celui de la grand’maternité… Oui ça existe, certaines l’ont déjà rencontrée. Comment être en phase avec ce qui nous arrive là ?
On reprend depuis le début.
– Maman j’attends en bébé
– Quoi, déjà ? questionne la très jeune femme en nous, pas prête du tout à être grand-mère ! Notre propre enfant vient à peine de s’autonomiser, c’est à notre tour de retrouver une liberté, non ?
Mais est-ce à dire que nos liens filiaux et « grands-filiaux » nous empêcheraient d’être libres, d’être « nous-mêmes »? Nous avions des projets, retrouver notre couple ou une solitude bien choisie et entourée, les voilà contredits par la (merveilleuse néanmoins) surprise qui arrive. Tout se bouscule. Qu’avons-nous fait de ce temps passé trop vite, plein de joie… et aussi de contraintes, n’aurions-nous pas vu grandir nos propres filles, et que ferons-nous de ce temps nouveau que nous commençons d’apprendre et de prendre pour nous depuis le départ de nos enfants ? Qui reviennent avec un cadeau, une vie en plus, et aussi des chamboulements à prévoir !
La culpabilité n’est pas loin – suis-je « normale » de ressentir ça ? quel égoïsme ! Le tout bien sûr parsemé de bouffées de joie et de questions :
– Au fait, « Il » (ou « elle ») ne m’appellera pas grand-mère, j’espère !
– Mais…
– Ni mémé non plus !!!
Nous posons nos conditions avant même que l’enfant ne naisse : « Le monde a changé. Sais-tu ma fille qu’une majorité de grands-mères profitent plus aujourd’hui de leur vie qu’elles ne gardent leurs petits-enfants, statistiques à l’appui».
– Et tu ne me vois pas tricoter quand même ? Je voudrais bien garder ton petit, mais faudra que je le sache par avance…
Mais ce dialogue, ce monologue plutôt, est contredit par la réalité qui pose d’autres postures émotionnelles.
– C’est fou comme elle me rappelle toi… dit une quinqua-grand-mère rajeunie d’une génération et retrouvant ses gestes de mère en moins angoissée.
– C’est fou comme on joue bien ensemble… dit une autre qui trouve dans l’énergie du gamin de quoi nourrir la sienne, dans le seul bonheur d’un moment gratuit et complice.
Ces rapprochements intergénérationnels sont légion. Ils mettent en présence des grands-parents libérés des devoirs éducationnels de parents, ils ajoutent à ces libertés des audaces qui ressemblent aux leurs.
Un lien de tendresse et de complicité se tisse, parfois hors normes parentales. Les grands-mères osent ce qu’elles n’ont pas fait faire à leurs enfants, trop obsédées de «bien faire» , d’être une «bonne mère»… Ici s’immiscent le jeu, le rire et l’aventure.
D’autres chiffres illustrent cependant les paradoxes de la grand-mère aujourd’hui :
– Pour 75 % des grands-mères, la grand-mère idéale est avant tout «jeune et tonique» et prend «plus de temps» pour elle-même.
– Du côté des petits-enfants, les 3/4 environ, filles et garçons, souhaitent encore plus de contact avec leurs grands-parents.
Où l’on verrait donc apparaître des exigences de temps pluri-actifs et une demande de plaisir sans contraintes. Et à terme, le besoin de redimensionner les liens entre enfants, petits-enfants et ses propres parents.
La question qui se pose est celle du (ou des) rôle(s) que nous choisirons d’adopter, dans le souci de soi et de l’autre, pour être en phase. Serons-nous des « passeuses » de sens? de confiance? de
futur? Comment aborderons-nous, combinerons-nous, notre projet personnel et professionnel à celui, générationnel, très plaisant mais néanmoins chronophage et responsabilisant de ce nouveau statut…
Et quelles seront la posture et la demande de nos propres enfants devenus parents, qu’attendront-ils de nous ? Un retour au bercail de ces quinquados qu’ils voudraient plus assagies ? Des aides matérielles évidentes (mais qu’on serait à même de décliner, n’a-t-on pas déjà donné ?). Auront-ils le désir et la délicatesse de ne pas imposer, consciemment ou pas, leurs projections stigmatisantes de ce que devrait être une « vraie » grand-mère ?
La venue d’un petit enfant est une mise en énergie et aussi en question de toute la constellation familiale. Je rajouterai aussi, évolution de la structure familiale oblige, la problématique des « beaux-grands-parents », surtout quand la belle-grand-mère n’a pas eu d’enfant elle-même et découvre un compagnon-amant devenu papy gâteau !
Mais les petits-enfants nous insufflent tant de surprises et de vitalité qu’à terme, ils corroborent nos propres désirs de vivre encore plus et de gagner, si ce n’est des ans, des liens uniques et intemporels.
Photo ©L.Askienazy
10 commentaires
En effet, un virage qu’il faut savoir prendre : accepter avec joie de prendre une génération de plus parce que ce n’est pas ça qui nous vieillira – c’est fou tous les surnoms que nos amies préfèrent au lieu du simple Mamie… ! Profiter de ce bébé parce que le temps passe tellement vite ! Profiter du rapprochement avec ses enfants qui sont devenus parents à leur tour ! Etre présente et dispo, mais dans les limites – nous avons des amies qui n’ont plus de moment pour elles. Nous en avion fait un post qui évoque aussi ce sujet
http://wp.me/p2H2o8-4er
je n’ai et n’aurais pas cette chance…..
Mais je pense qu’être mamie ne fait pas forcément vieillir, au contraire!!!
et puis le role de grand-mère n’a rien à voir avec celui de maman…. la mamie n’est pas là pour l’éducation mais plutôt pour s’éclater avec ses petits enfants et cela l’enlève rien à la liberté…..
Enfin c’est ce que je pense mais peut etre que je me trompe…..
Je vais devenir grand-mère cet année! et cela ne me fais absolument pas plaisir! Quand je vois le monde et quel est le futur qui les attend… je me dis « mais qu’elle idiote je fus d’avoir eu des enfants »
Quand j’ai appris que j’allais être grand-mère à 45 ans, ça m’a un peu bousculé !
franchement quel bonheur les petits enfants on se retrouve en famille on a plein de projets
ils attendent tellement de nous
Moi ç’est arrivé il y a 10 ans et j’ ai 50 ans aujourd’hui j’ai 4 petits trésors 3 trésors et » beau trésors
la vie est belle
vivre de chose naturelle et simple c’est ça le bonheur
Bien à vous
Mamou Mimi
Merci Myriam pour votre témoignage. Ça doit en effet être une grande joie. Profitez bien des jolis moments que vous passez avec vos petits-enfants. Bien à vous. Les Boomeuses
Moi je suis tranquille je ne serai jamais grand mère n’ayant jamais voulu d’enfants (et alors aucun regret !) mais je trouve l’article pertinent et plutot intéressant de lire le point de vue d’en face sur ce sujet 🙂
PS : je trouve quand meme que ça donne un coup de vieux, et ce nom de mamie plutot vilain et réducteur je préfère grand mère (mais aucune idee pour le nom, je n’appelais jamais les miennes mamie ou grand mere ça me faisait peur je leur parlais et les embrassais directement), mais je pense que c’est le passage d’un statut à un autre qui m’angoisse, les changements d’état sont toujours effrayants et quand quelque part ils ne sont jamais entérinés on reste un peu hors du temps perso je préfère mais chacune sa façon d’essayer de traverser l’existence au mieux.
PPS : en meme temps j’ai l’impression que Corinne a raison.
il faut dire que Mamie c’est assez vilain aussi, comme nom, quoique je n’ai aucune idée de par quoi on pourrait le remplacer, je n’osais jamais « nomer » mes grand mères ça me bloquait, gamine j’avais très peur de la vieillesse et j’avais l’impression que les appeler mémé mamie etc… les aurait cassées ou abimées ou pire, c’était mon propre ressenti elles ça ne les aurait pas genées. En tout cas je suis tranquille, pas d’enfants et je suis fille unique, ouf !