cancer du sein

La reconstruction après un cancer du sein

par Odile Bagot

Pour clore cette série d’articles consacrés au cancer du sein, une chronique sur la reconstruction.

Cela fait presqu’un an que cette terrible nouvelle est venue chambouler le cours de la vie, les traitements sont derrière soi, tout est apparemment fini et pourtant, c’est là que tout commence.

C’est souvent à cette période-là que resurgit la question de la reconstruction mammaire. Aux tout premiers temps de la maladie, même parfois dès l’annonce, le sujet a pu être évoqué. C’est souvent le médecin qui en a parlé, pas la femme, car bien d’autres interrogations se bousculent alors dans sa tête et la priorité n’est pas le sein, mais la vie ! Oui, aucune femme ne peut esquiver, ne serait-ce qu’inconsciemment, cette inévitable tension entre Eros et Thanatos à l’annonce d’un cancer du sein.

Il m’est arrivé cependant de rencontrer des femmes pour lesquelles la conservation du sein était un impératif, alors que pour des raisons carcinologiques cela n’était pas possible sans grever l’avenir d’une hypothèque. La perspective d’une reconstruction immédiate, ou à distance, permet alors, non pas tant d’accepter, mais au moins de supporter le sacrifice de son sein.

A l’opposé, certaines femmes ne souhaiteront pas de reconstruction, soit parce qu’elles ont une petite poitrine et se sont accommodées de l’asymétrie, soit parce qu’envisager un nouveau parcours chirurgical est au-dessus de leurs forces ou tout simplement parce qu’elles n’en ont pas le désir.

Ces propos liminaires pour vous dire combien l’exercice m’est difficile de parler de la reconstruction mammaire tant les situations sont particulières

Chaque femme est différente dans la relation intime à son sein et la représentation fantasmatique qu’elle en a. Mais aussi, toute femme a des attentes et des aspirations uniques dans ce qu’elle souhaite voir, et donner à voir de son corps. Pour compliquer le tout, d’un point de vue strictement technique, le choix du type de reconstruction est conditionné par de nombreux critères médicaux, chirurgicaux et anatomiques ! Comme ce choix se fera entre le chirurgien et la patiente, je vais vous faire une synthèse de tout ce qu’il est nécessaire de savoir pour discuter en toute connaissance de cause avec mes très chers confrères !

Vous avez bénéficié d’une tumorectomie avec conservation du sein

Dans ce cas, le chirurgien, dans la mesure du possible, aura utilisé des techniques particulières qui laissent une cicatrice discrète et ne déforment trop le sein. Si l’asymétrie est très importante entre les deux seins, on peut rajouter une prothèse derrière le muscle pectoral ou, si elle est modérée, corriger l’ asymétrie par un lipofilling. Il s’agit d’une technique de chirurgie esthétique qui consiste à prélever des cellules adipeuses au niveau des fesses ou du ventre par liposuccion douce et de les réinjecter dans le sein où il manque de la substance. Les complications sont rares, mais ça fait tout de même mal aux fesses un certain temps !

Les dernières études ont montré qu’il n’y avait pas d’augmentation des risques de récidive locale du cancer en cas de lipofilling. Cette technique permet aussi, dans des reconstructions après mastectomie, de faire les finitions et les retouches si nécessaire.

Cancer du sein et mastectomie

L’atteinte de l’image corporelle est constante, mais chacune la vivra à sa façon selon son rapport particulier et unique à son sein. Il en est de même du compagnon qui peut s‘être familiarisé rapidement avec votre profil d’amazone ou qui, au contraire éprouvera des difficultés avec ce corps marqué par la maladie et attaqué là où s’incarne un des symboles de la féminité.

Certaines femmes peuvent bénéficier d’une reconstruction immédiate, le plus souvent par une prothèse d’expansion qui sera gonflée progressivement. Dans certains cas, on peut proposer une chirurgie reconstructrice dans le même temps opératoire que la mastectomie. Ces techniques sont toutefois contre-indiquées dans de nombreux cas, comme la radiothérapie post-opératoire par exemple.

C’est donc à distance, et habituellement une fois les traitements terminés, que la question de la reconstruction se pose. Il est extrêmement important d’être en paix avec sa demande de reconstruction, même si pour cela doit prendre plusieurs années ! 

Parmi les différentes possibilités de reconstruction actuelles, le choix final dépendra bien sûr de vos souhaits et de vos appréhensions, mais aussi de votre morphologie et des possibilités chirurgicales.

Pour faire simple, on fera la distinction entre les prothèses et la chirurgie non prothétique.

La pose de prothèse peut se faire en un temps si le volume n’est pas trop important et la peau souple, ou progressivement au moyen d’une prothèse d’expansion que l’on remplit de liquide jusqu’à obtenir le volume suffisant pour poser la prothèse définitive. C’est une chirurgie relativement rapide et simple, avec peu de complications, mais une petite incertitude sur l’évolution de la prothèse. En effet, l’organisme peut réagir en fabriquant une coque autour de la prothèse qui peut prendre l’aspect d’une balle de tennis, ou bien la prothèse peut migrer depuis sa position initiale. Ces complications ne sont toutefois pas assez fréquentes pour vous dissuader de mettre une prothèse si tel est votre choix.

Pour la chirurgie sans prothèse, il y a deux grandes techniques selon que l’on prenne un muscle -du dos (grand dorsal), des abdominaux (TRAM), de la face interne de la cuisse (Gracilis) – ou un lambeau de la graisse du ventre (DIEP). Ces techniques peuvent nécessiter plusieurs temps opératoires, et elles présentent un certain nombre de contre-indications et de complications. En revanche, une fois le nécessaire temps de la cicatrisation passé, le résultat est définitif et stable. Je préfère ne pas vous détailler chaque technique, c’est à discuter point par point avec votre chirurgien jusqu’à ce que vous soyez vraiment au clair sur la question.

Pour finir cette chronique, je pensais écrire un chapitre « Reconstruire sa vie ». Mais que suis-je pour prétendre à cela ? Alors, je ne témoignerai que d’une chose : cette étincelle de vie supplémentaire que j’ai vu luire dans les yeux de tant de femmes après cette épreuve ! Merci Cathy, Myriam, Anne-Marie, Latifa, Béatrice, Zohra, Francine, Catherine, Martine, Madeleine, et tant d’autres …

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Photo, catherine Mussinsky

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