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Ecole buissonnière dans la Meuse

par Evelyne Dreyfus

Trempez votre madeleine toute fraîche dans du thé, goûtez et retrouvez vos souvenirs d’enfance… Venez faire l’école buissonnière dans une Meuse bucolique à souhait, pays de la madeleine et de tant d’autres plaisirs simples qui nous réparent.

A seulement une heure quinze de Paris en train, laissez aller votre curiosité, vous ne le regretterez pas. La Meuse est certes cette terre martyrisée du premier conflit mondial. En cela il émane d’elle quelque chose d’indiciblement émouvant qui favorise, peut-être, le coup de cœur que l’on peut avoir en regardant sa face diamétralement opposée qu’offre la région pittoresque des Côtes de Meuse.

la meuse

 

On ne s’y attend pas nécessairement mais, sur place, quelque chose de l’esprit d’enfance vous prend à la gorge et vous donnerait presque l’envie de sauter à pieds joints dans une flaque d’eau, de chiper, l’été venu, quelques mirabelles dorées à même les arbres, de prendre un brin d’herbe entre ses pouces pour la faire siffler. Le goût simple de la vie qui défie, poétiquement, celui de trop de mort répandue sur les vastes champs de bataille alentour de Verdun.

Ici, on cesse de courir après le temps, on reprend son souffle. Et on surveille la route où il n’est pas rare du tout de voir traverser sangliers, biches et lièvres : un véritable safari en Meuse.

Mirabelles, truffes, brie de Meaux (et oui c’est ici qu’il est fabriqué !), madeleines de Commercy et dragées de Verdun, bière et vins de Meuse sont les incontournables pour réjouir les papilles.

Hattonchâtel, un village étonnant

Dans la quarantaine de kilomètres qui borde les côtes de la Meuse, se trouve une pépite. Un village étonnant. Pas sophistiqué, pas débordant de jardinières pimpantes accrochées aux balcons.

Pourtant Hattonchâtel avec sa centaine d’habitants et situé au cœur du Parc naturel régional de Lorraine, réserve d’attachantes surprises. C’est un point de chute idéal pour un court séjour en toute saison. Une sorte de pochette surprise dans laquelle se mêlent friandises gustatives, culturelles et cadeaux-surprise.

D’abord cibler votre logis. J’avais opté en ce printemps naissant pour un gîte grand confort (4*) dans le village, face au château. C’est une maison individuelle de village datant du 18ème siècle entièrement rénovée en 2021.

gite ISabel, meuse

Ambiance contemporaine chaleureuse faite de bois blond et de couleurs pastel. Elle offre un confort qu’on n’a pas toujours, même chez soi. Matériaux et mobilier de qualité, cuisine suréquipée, lits king size ou doubles dans les chambres au nombre de deux et belle salle de bains. Equipements wi-fi (avec fibre), hi-fi, écrans plats dans tous les espaces, DVD à disposition, accueil impeccable et pleine vue sur le château médiéval qui lui fait face. Paul et Isabelle Leiritz n’ont pas lésiné sur les moyens. Infos sur le Gite Isabel 

Une belle histoire de femme

Peut-être est-ce en partie par son histoire que Hattonchätel a été récemment retenue parmi les 14 communes finalistes pour le concours du Village préféré des Français, cru 2023.

C’est l’histoire d’un village détruit lors de la Grande guerre et généreusement reconstruit, à coup de millions de dollars US de l’après-guerre par une fée américaine du nom de Belle Skinner, décédée en 1928 et qu’on s’attend pourtant presque à croiser dans les rues du village. Tout y parle d’elle, même l’original monument aux morts qui, pour une fois, ne représente pas un soldat mais une fermière au regard épuisé, hommage aux innombrables femmes ayant fourni un si dur labeur alors que les hommes étaient tous au front.

C’est Belle Skinner aussi qui a fait reconstruire la mairie (inaugurée en présence du président Raymond Poincaré natif de la Meuse), la bibliothèque, l’école, un système d’eau courante, aménager des lavoirs couverts surélevés pour protéger le dos des lavandières. Et elle encore et surtout qui a fait reconstruire intégralement le château d’Hattonchâtel construit pour l’évêque Hatton de Verdun, en 859 et resté intact jusqu’en 1624. Il fut ensuite détruit par les armées de Richelieu soucieux de saper la puissance des Ducs de Lorraine, puis en 1633 par les Suédois. Reconstruit par les Ducs de Lorraine en 1681 (à qui dit-on il servit beaucoup de… garçonnière…), il fut de nouveau détruit lors de la première guerre mondiale par des tirs américains destinés à en déloger les Allemands qui l’occupaient et refusaient de se rendre. Ce qui valut sept jours de bombardements et une destruction du château à 90 %.

Belle Skinner, francophile et philanthrope

C’est là qu’intervient miss Belle Skinner. Cette native des Massachusetts très francophile était une femme d’affaires et philanthrope, également mélomane et collectionneuse d’instruments de musique. Pendant et après la guerre elle a utilisé sa fortune pour fournir en nombre, vêtements et chaussures. A l’issue de la guerre elle décida d’adopter l’ancien village médiéval d’Hattonchâtel en ruines en y consacrant un million de dollars.

Elle devint aussi présidente du comité américain des villages libérés encourageant les riches Américains à participer financièrement à l’effort de reconstruction des villages dévastés de l’Est de la France. Sa francophilie est allée jusqu’à créer une bourse de 10 000 dollars en faveur des diplômés du Vassar College pour étudier l’histoire de France, montant qu’après sa mort, son frère William Skinner porta à 25 000 dollars. Et puis, rendons grâce à cette grande dame qui, bien que le château appartienne depuis 2007 à des propriétaires privés, permet désormais à bien des touristes de séjourner dans ses chambres ou de se restaurer dans sa magnifique salle à manger. Un cadre parfait pour de nombreux mariages et événements divers.

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A ne pas manquer en proche périphérie

Même logés confortablement et prêts à rester aussi oisifs que cet environnement y encourage, voici quelques idées de découvertes tout à proximité.

Les belles rencontres

On croise sur ce territoire des personnalités d’une grande richesse humaine et enclines à partager avec vous leurs passions :

  • Le chocolat par Romain Viaud. Un orfèvre ce jeune homme. Centralien de formation, puis cinq ans en poste chez Areva à Paris dans le nucléaire avant de mettre toute son énergie dans le chocolat. « Je suis passé de la fission à la fusion » aime-t-il à dire et je vous le garantis : vous n’avez jamais fait l’expérience du chocolat comme celle que propose Romain. Sa vision et ses réalisations sont un bijou de sensorialité longuement étudié. D’ailleurs se chocolats ne ressemblent à rien de ce que vous connaissez : ils ont une forme de goutte, étudiée pour s’adapter aux palais, à laisser fondre sans les croquer pour libérer toute leur sensorialité. Une pure découverte qui a commencé avec son premier client, la maison Hermès. Agapeo
  • Le guide nature et photographe Fabrice André à Lachaussée. La nature est sa maison. Avec lui, sur rendez-vous, vous pouvez aller découvrir les étangs de Lachaussée à deux pas de sa maison et observer les innombrables oiseaux migrateurs qui transitent par cette zone hautement protégée. Il saura vous les nommer tous et vous guider aussi dans vos prises de vues photo ou dans les sorties immersives en pleine nature. Fabrice.andre.57@gmail.com
  • Le jeune chef Quentin Pierre. La valeur n’attend pas le nombre des années. Cela se confirme. A 26 ans, il a déjà fait ses preuves notamment auprès d’un chef étoilé à Metz mais aussi à Nancy puis au château de Hattonchâteau. Il est depuis reconnu « jeune talent » par Gault et Millau et ouvre désormais son propre restaurant, La Mangeoire, à Nonsard-Lamarche tout près du lac de Madine. Retenez une table à partir de juin 2023 ! C’est du gastronomique. La mangeoire

A voir en mode Slow Tourisme

  • Le château de style troubadour d’Hattonchâtel. Il est tout à fait possible de sonner à l’entrée pour visiter la belle cour jardin arborée et son panorama sur les côtes de Meuse et la grande salle de restaurant. Son gérant, Fabien Calvi connaît l’histoire de son château jusqu’au moindre détail et en parle volontiers. Château de Hattonchâtel
  • L’imposant mémorial américain de Montsec qui offre un panorama à 360 degrés sur le lac de Madine et toute la campagne vallonnée du Parc régional naturel de Lorraine.
  • La petite cité de Saint-Mihiel, véritable foyer artistique et culturel jusqu’au 18ème siècle, avec sa remarquable Bibliothèque Bénédictine et les chefs d’œuvres de Ligier Richier, natif de Saint-Mihiel et chef de file d’un renouveau culturel au 16ème siècle. Notamment son œuvre » majeure, dans l’église Saint-Etienne, la très belle sculpture de la mise au tombeau, groupe monumental, sculpté dans la pierre calcaire locale. www.coeurdelorraine-tourisme.fr
  • Le lac de Madine. Avec 1100 hectares ce très grand lac en plein cœur d’une réserve nationale ressemble à un bord de mer. Plage de sable, port de plaisance, club de plongée, voilier, centre équestre, golf 9 trous, randonnées et bien sûr restauration et hébergements insolites : impossible de ne pas y trouver son compte. Si vous voulez tout cet espace rien que pour vous ou presque, mieux vaut y aller en semaine ou hors saison. Avec une telle offre, l’attrait attire du monde. www.lacmadine.com

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Bonnes tables

Vous aurez l’embarras du choix mais voici deux adresses testées et qui tiennent leurs promesses :

  • Restaurant de l’Hôtel Drapier près du Lac de Madine. Raffiné, savoureux, en terrasse l’été ou près du feu de cheminée dans un décor aussi raffiné et élégant que l’est la cuisine. Un rapport qualité/prix remarquablement juste pour cet établissement Logis de France avec un plat du jour à 17 € . Maison Drapier
  • Boucherie restaurant Polmard à Saint Mihiel. Un pur bonheur que cette vaste boucherie-restaurant décorée avec soin. La viande, directement sélectionnée au comptoir boucherie et cuite sur place est «à tomber » tant en termes de qualité que de justesse de la cuisson. L’accompagnement en légumes est parfait. Le rapport qualité/prix tout autant. Polmard
  • Et pour acheter de quoi prolonger l’esprit région dans vos bagages, un petit tour à la Boutique Jardin de Lorraine à Billy. Située juste en face d’un grand verger de mirabelliers sous lesquelles s’éparpillent des dizaines de moutons, la boutique propose d’innombrables produits made in Meuse et notamment la mirabelle sous toutes ses formes : eau de vie, liqueur, sirop, confiture, fruits au sirop et même bières… Jardin de Lorraine

Les propositions de découverte de la Meuse étant très nombreuses, choisissez selon vos goûts à travers le site www.lameuse.fr

Texte : Evelyne Dreyfus
Photos : Jacques Douay

 

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