Sur la petite scène du mythique Théâtre de la Huchette, François Feroleto nous transporte dans une épopée italienne, entre autofiction et habile adaptation de nouvelles de l’écrivain Dino Buzzati. Un spectacle hors-norme et fascinant.
Marcello est emprisonné depuis douze années, condamné à perpétuité pour une raison que le spectateur ne découvrira qu’à la fin de la pièce. Il attend de paraître d’un balcon de la prison pour s’exprimer face à la foule, qui selon la tradition instaurée par le directeur de l’établissement pénitentiaire, pourra décider de son sort après son discours, sur le mode des arènes antiques, l’applaudissant pour le faire sortir ou le sifflant pour le laisser enfermé à jamais.
Ne sachant pas s’il sera « convoqué », il décide de s’adresser à son fils, qu’il n’a pratiquement pas connu, afin de lui conter son histoire. Celle d’un jeune italien originaire de Calabre, qui comme nombre de ses compatriotes italiens du Sud, est forcé de migrer dans les années cinquante vers le Nord de la péninsule pour échapper à la misère.
Un train pour Milan une déclaration d’amour aux origines italiennes de François Feroleto
Partiellement inspiré de l’histoire de son père, le beau texte de François Feroleto s’articule aussi autour de trois nouvelles de Dino Buzzati, qui apportent à sa dramaturgie le souffle fantastique propre aux récits de l’auteur du Désert des Tartares.
Le destin de la plupart des migrants du Sud, méprisés et exploités par leurs compatriotes du Nord, se croise alors avec l’univers onirique de Buzzati, dans un drôle de ballet faustien rythmé par les chansons cultes d’Adriano Celentano et une tarentelle que danse le comédien avec une grâce infinie.
Subtilement mis en scène, Un train pour Milan est un spectacle unique, déclaration d’amour aux origines italiennes de François Feroleto, qui après trente années de rôles sur les planches, à la télévision et au cinéma, se révèle avec brio auteur et metteur en scène de théâtre.
Cadeau ultime, la pièce offre au spectateur le bonheur de réentendre l’impressionnante voix de Michel Bouquet, qui vient hanter le personnage de Marcello au cours du récit. Cet enregistrement, qui fut le dernier du mythique acteur, reste l’un des moments les plus puissants du spectacle.
Lors de son salut, François Feroleto raconte aux spectateurs comment son « maître » et ami Michel Bouquet, avec qui il joua plus de 500 fois la pièce A tort ou à raison, accepta d’enregistrer pour lui ce texte de Buzzati.
Un présent qui rend d’autant plus précieuse cette pièce à découvrir absolument.
Un train pour Milan
Jusqu’au 2 décembre
Du mardi au samedi, 21H
Théâtre de la Huchette
23, rue de la Huchette
75005 Paris
Lire aussi : « Mes chers enfants » au Lucernaire : l’hymne à la mère d’Anny Duperey
Photos©Yannick Debain