Un sujet encore tabou, mais pourtant primordial à partir de la ménopause, la sécheresse vaginale qui touche de trop nombreuses femmes.
Heureusement, il existe aujourd’hui des méthodes, pas toujours bien connues des femmes, qui apportent un véritable soulagement.
Nous avons rencontré le Docteur Magali Dubois, dermatologue spécialisée dans les pathologies génito-urinaire pour faire le point sur les traitements.
Docteur Magali Dubois, parlez-nous des nouvelles méthodes pour lutter contre la sécheresse vaginale à la ménopause ?
Dr.Magali Dubois : aujourd’hui, nous disposons de nouvelles méthodes efficaces comme le laser ou l’acide hyaluronique pour lutter contre les problèmes de sècheresse vaginale.
Mais, il faut que les femmes parlent sans tabou de ce problème à leur gynécologue ou à leur dermatologue, car nous sommes formées à ces techniques. Mais, souvent les femmes pensent, à tort, qu’il n’existe pas de solutions et c’est pour cela qu’elles n’en parlent pas non plus. D’où l’importance de l’information.
Par exemple dans ma salle d’attente, il y a une petite affiche, assez neutre, qui parle de sécheresse vaginale et de douleur, et finalement ça délie beaucoup les langues. Les patientes qui viennent pour un problème dermatologique (grains de beauté, petites tâches), me parlent de l’affiche et de leur problème. On se rend compte que beaucoup de femmes en souffrent en silence.
La sécheresse vaginale un vrai problème à la ménopause ?
On dit que les problèmes de sécheresse vaginale touchent 50% des femmes ménopausées, et pas directement dans l’année qui suit la ménopause. Généralement cela met 4 ou 5 ans à s’installer. Les femmes ne pensent pas au traitement hormonal substitutif, parce qu’elles pensent que ça se passe bien et ne se disent pas que dans 5 ans, elles risquent d’avoir des problèmes de sécheresse.
Il faut que les femmes parlent sans tabou de ce problème à leur gynécologue ou à leur dermatologue
Est-ce que le fait d’être sous THM réduit ces problèmes de sécheresse ?
Cela dépend du type de traitement mais c’est évident que le traitement hormonal substitutif évite certaines douleurs et problèmes de sécheresse. Mais, les douleurs peuvent quand même arriver sousTHM et puis il y a des patientes qui ont des problèmes de douleurs et qui n’ont pas le droit au traitement hormonal, notamment les femmes qui ont des antécédents de cancer du sein, pour elles, les nouvelles techniques de type injection ou laser, c’est vraiment très important.
Il faut qu’elles puissent y avoir accès, c’est un vrai substitut pour elles. Même si l’on sait que l’on peut prescrire les traitements hormonaux locaux à petites doses, on est toujours un petit peu frileux à le faire.
Parlez-nous des différentes méthodes
Le laser fractionné et les injections d’acide hyaluronique sont les techniques les plus accessibles « en routine ». Il y a aussi des développements qui sont faits sur des injections de graisse autologues par exemple.
On injecte sa propre graisse sous différentes formes, il s’agit de techniques plus invasives, parce qu’il faut prélever la graisse au préalable. Cette méthode est utilisée pour des problèmes plus importants, de type reconstruction après un lichen scléreux ou après une radiothérapie.
Parmi les techniques qui se développent, il y a aussi les injections de toxine botulique pour les patients qui souffrent de vaginisme par exemple, ou la radiofréquence.
Le laser fractionné et l’acide hyaluronique sont utilisés depuis des années au niveau de la sphère cutanée à visée esthétique ou pour des cicatrices. C’est donc l’application de ces techniques que l’on utilise pour la sphère génitale.
L’acide hyaluronique est une molécule présente naturellement dans notre organisme. Une fois injectée, elle va former une sorte de petite éponge qui va hydrater les tissus, apporter du confort, plus d’élasticité au tissu (qui est moins fragile) et une meilleure hydratation. On injecte le produit principalement autour de l’entrée du vagin ou dans les premiers centimètres, là ou la sécheresse et les douleurs sont le plus ressenties. Cela fonctionne pour les problèmes de sécheresse, mais aussi pour les problèmes de cicatrices d’épisiotomie.
Le laser agit différemment. Le laser fractionné va chauffer la muqueuse en une multitude de petits points qui vont stimuler la fabrication de collagène et du collagène de meilleure qualité.
A la ménopause, la carence d’oestrogène entraîne un manque de vascularisation dans les tissus. Le fait d’avoir à nouveau une meilleure vascularisation va impliquer une meilleure hydratation.
Comment choisissez-vous l’une ou l’autre méthode ?
Je choisis en fonction des symptômes de la patiente. L’acide hyaluronique est injecté à l’entrée du vagin, donc l’action va être plus localisée.
Avec le laser fractionné, on utilise une pièce à main qui est comme un petit spéculum que l’on rentre à l’intérieur ce qui permet de traiter l’ensemble du canal vaginal. Pour les patientes qui se plaignent du sensation de sécheresse plus globale et plus interne, je vais plutôt choisir le laser.
Si une patiente se plaint de sensation de papier de verre, tellement c’est sec pendant les rapports ou de sécheresse globale, je vais partir sur le laser. Par contre si elle me dit ça fait mal à l’entrée, mais après ça va, je vais choisir plutôt l’acide hyaluronique. Parfois, je combine les deux méthodes.
Les résultats sont-ils immédiats ? Comment se passe les traitements ?
Pour l’acide hyaluronique, les résultats sont très rapides. Le produit se met en place dans les trois semaines qui suivent l’injection.
Pour le laser CO2 fractionné et la stimulation des fibroblastes, cela prend plus de temps, il faut compter trois séances à un ou deux mois d’intervalle. Et l’amélioration continue à se mettre en place dans les trois à six mois qui suivent la dernière séance.
Est-ce que les résultats sont durables ?
Oui les résultats sont assez pérennes. Même si avec les années, l’atrophie continue à s’aggraver.
Pour le laser, on recommande trois séances la première année, puis une annuelle en entretien.
Pour les injections d’acide hyaluronique, on va être amené à faire une injection par an. Même si on se rend compte qu’au fur et à mesure des injections, leur efficacité dure de plus en plus longtemps.
Est-ce qu’il y a des effets secondaires ou des risques ?
Il s’agit de techniques que l’on connaît depuis des années au niveau cutané et que l’on maîtrise très bien, avec peu d’effets indésirables. Une grande majorité des femmes peut en bénéficier sans aucun risque.
Maintenant, quel que soit la technique, s’il y a une infection à ce moment-là, un herpès génital, on ne fera pas le traitement. L’acide hyaluronique a une contradiction classique, qui concerne les maladies auto-immunes évolutives.
Est-ce douloureux ?
Non, est c’est important de le savoir, il s’agit de techniques peu, voire pas du tout douloureuses.Les femmes imaginent des choses douloureuses parce qu’on parle d’injection ou de laser, elles pensent que ça va piquer, brûler.
Pour le laser, ce qui est un petit peu désagréable, c’est l’introduction de la pièce à main, comme un petit spéculum chez le gyneco. Mais lorsque les patientes sortent d’une séance, elles reconnaissent toutes qu’elles s’étaient fait un film pour rien.
Avec le laser que j’utilise la séance dure moins de dix minutes, et les tirs laser en eux-mêmes sont extrêmement peu ressentis, parce qu’on a une sensibilité intr vaginale peu sensible au chaud. Pareil pour l’injection d’acide hyaluronique, d’autant que l’on utilise souvent un anesthésiant local au préalable et que cela dure moins de 10 minutes.
Ces traitements conviennent-ils à toutes les femmes ?
Cela convient à toutes les femmes, et je suis d’ailleurs surprise de voir à quel point souvent elles viennent me consulter un peu comme une bouée de sauvetage en dernier recours, et c’est vraiment dommage.
Je vais prendre l’exemple d’une procédure esthétique, alors que l’on n’est pas du tout dans de l’esthétique, mais bien dans du fonctionnel ! Mais, c’est comme si une patiente venait me voir à 80 ans, avec un visage plein de rides et me disait, Bon, est-ce qu’on peut faire juste un petit truc juste avec une seringue ?.
Le message que j’aimerais faire passer aux femmes est de ne pas attendre de sentir une sécheresse ou d’être gênées pour penser à ces techniques parce que forcément, les résultats sont meilleurs quand on traite le problème précocement
Surtout que quand les femmes attendent trop, il y a un cercle vicieux de la douleur qui s’installe. Elles commencent à souffrir et vont avoir une diminution de la libido et du désir. Les rapports ne doivent pas être associés à la douleur, parce que sinon cela va être plus difficile de reprendre confiance en soi.
Bénéfices des ces méthodes ?
Ces méthodes vont traiter la sécheresse et les douleurs. Les patientes qui se plaignent de fissures ont aussi une amélioration. On constate aussi une amélioration des signes urinaires liés à la sécheresse, ce qu’on appelle maintenant le syndrome génito-urinaire de la ménopause (SGUM).
Il existe également des signes urinaires liés à l’atrophie, notamment les envies fréquentes de faire pipi, ou l’urgenturie, c’est-à-dire le besoin urgent de faire pipi. On sait qu’en améliorant l’atrophie au niveau génital, on améliore aussi les signes urinaires et la flore en reconstituant une bonne flore. Avec la ménopause, le pH vaginal a tendance à augmenter et provoquer certains troubles associés. Des études ont montré qu’en faisant du laser en intravaginal, on notait une amélioration du pH et une amélioration de la flore.
Quels sont les prix de ces méthodes ?
Malheureusement, ces injections qui ne sont pas du tout de confort, ne sont pas remboursées par la sécurité sociale.
Dans mon cabinet, une séance d’acide hyaluronique ou de laser coûte entre 250 et 400 €. Pour l’acide hyaluronique, une seule séance suffit. Pour le laser, il faut compter trois séances la première année.
Magali Dubois est dermatologue, spécialisée en pathologies des muqueuses buccale et génitale à Sanary-sur-Mer. Elle est également membre du Comité Scientifique de la Société Française des Lasers en Dermatologie (SFLD), qui rassemble les dermatologues et médecins laséristes pratiquant des actes laser, des lumières intenses pulsées, de la radiofréquence et toutes les sources lumineuses ou ondes électriques, tant à visée thérapeutique qu’esthétique, dans le but de promouvoir les règles de « bonne pratique » et d’atteindre l’excellence dans la prise en charge des patients. La SFLD réalise également le site www.laser-et-peau.com un site web d’information clair, fiable et indépendant, destiné au grand public et aux patients afin de trouver des réponses à toutes questions. sur les traitements et les nouveautés ainsi qu’un annuaire des membres.
Photo@Brigitte Lazarroo pour les Boomeuses