Je viens de voir le film » Sage-femme » de Martin Provost. Je pourrais raconter un synopsis que l’on trouve facilement ici et là. J’ai plutôt envie de parler du lien, de la tendresse. Claire (Catherine Frot) est sage-femme, les naissances se succèdent dans le film et on ne se lasse pas de voir ces bébés, tout englués de liquide amniotique, posés sur le ventre de leurs mères. C’est du travail pour Claire, il n’y a pas de temps pour l’émotion et la peur. « La peur, on l’oublie » dit-elle, même si on la voit tenter de réanimer un nourrisson avec des mots qui tirent les larmes des yeux, »Allez, petit, respire » et le doigt qui doucement fait un massage cardiaque. La tendresse, c’est aussi l’annonce que lui fait son fils d’un bébé à venir, c’est aussi le regard de Paul, amoureux, qui cultive le jardin près du sien, entre l’autoroute et la Seine, leurs étreintes dans le cabanon et le repos d’après l’amour dans cet endroit imparfait.
Dans l’histoire de la tranquille Claire, Béatrice (Catherine Deneuve), une flambeuse accro à tous les plaisirs, vient tout bouleverser. Elle a aimé son père puis s’est volatilisée alors qu’une famille s’était reconstituée. La voilà qui resurgit du passé, pour annoncer qu’elle va mourir d’une tumeur au cerveau et qu’elle aimerait, avant, revenir au temps des jours heureux.
La sage-femme et l’aventurière semblent parties pour être les héroïnes d’une fable sur l’existence. Mais le film est bien plus surprenant, car la vie s’y engouffre de toutes parts. Un mot d’ordre libérateur pour le réalisateur de Séraphine et Violette. Le talent de Martin Provost est de créer la magie de l’instant. Chez Claire, Paul se lève en pleine nuit et tombe sur Béatrice, qu’il ne connaît pas et qui lui lance, sans préambule, «vous avez des cigarettes ?». De cette rencontre qui pourrait être bancale, la grâce surgit.
Martin Provost raconte bien plus qu’une réconciliation dans la tendresse. A travers Claire et Béatrice, il dit l’importance d’être au rendez-vous de notre propre bonheur : savoir ce qui nous soutient, qui on aime et qui nous aime, et en être reconnaissant, il dit la fugacité du bonheur. Cette leçon de vie fait vibrer une émotion profonde. La musique de Grégoire Hetzel se pose en belle harmonie sur une mise en scène qui trouve sa force dans la modestie. La délicatesse qui porte tout le film n’est jamais soulignée. Mais elle entoure d’affection les personnages et leurs interprètes, particulièrement, bien sûr, les deux Catherine. Elles sont tout à la fois romanesques et vraies, plus natures et plus brillantes que jamais.
Sage-femme de Martin Provost avec Catherine Deneuve et Catherine Frot
[infobox bg= »redlight » color= »black » opacity= »on » subtitle= » Dominique Mallié, blogueuse nous livre chaque mercredi sa vision de cinquantenaire sur des sujets qui la touchent, l’émeuvent ou la font s’interroger sous la forme de chroniques au ton décapant. Elle tenait le blog «chic, j’ai cinquante ans » sur l’Express Styles avant de rejoindre Les Boomeuses. Prof de lettres, elle organise régulièrement des lectures de textes qu’elle écrit dans sa ville d’ Avignon. Passionnée d’art, elle court les expositions et nous fera également partager quelques-uns de ses coups de coeur pour les artistes. »][/infobox]
Sage-femme ou la délicatesse à l’écran
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4 commentaires
Si bien écrit comme d’habitude que l’on a envie d’aller voir ce film! Merci Dominique
Merci Anne
Un film qui devrait nous plaire – mais qui peut se regarder aussi à la télé, non ?
Il vient de sortir , donc pour la télévision, il faudra attendre 🙂