bain de boue chatel-guyon

Le thermalisme auvergnat
en pleine récupération

par Yves Hardy

La crise du Covid-19 avait mis à l’arrêt les stations thermales. Elles reprennent à présent leur élan en rénovant leurs installations, en affirmant leurs spécificités, mais aussi en diversifiant leurs activités. Vérification dans cinq d’entre elles situées dans le Puy-de-Dôme : Royat, Châtel-Guyon, Châteauneuf-les-Bains, La Bourboule et Le Mont-Dore.

Un voyage-découverte des vertus curatives des eaux de source. Première escale à Royat-Chamalières à la lisière de Parc régional des volcans d’Auvergne. Une entrée avenante, un hall égayé de vitraux précèdent l’accueil convivial du directeur de l’établissement thermal, Dominique Ferrandon. « La fréquentation remonte, souligne-t-il. Nous accueillerons plus de 6100 curistes en 2023. Cependant, nous restons encore en dessous des chiffres d’avant la pandémie : 7000 curistes en 2019 ».

Un voyage-découverte des vertus curatives des eaux de source

Le responsable insiste sur l’une des orientations thérapeutiques principales du centre, les maladies cardio-artérielles (MCA). « La cure thermale, indique-t-il, a pour but de créer une vasodilatation, soit par l’action du gaz thermal CO², soit par l’effet de la chaleur, afin de faciliter la circulation du sang dans les membres inférieurs ».

Cure thermale Royat

L’entrée des thermes@Y.Hardy

Le temps d’enfiler tenue de bain et peignoir, nous passons du discours aux tests. Premières mises en condition par immersion dans une baignoire, puis arrosage par une douche au jet à forte pression, assez tonique. Ensuite, viennent les plats de résistance. D’abord un enveloppement de boue sur le dos. Le cataplasme est composé d’argile verte et d’eau de source, le tout porté à une température de 44° à 48°.

« Plus c’est chaud, plus c’est efficace, car la chaleur favorise l’ouverture des pores de la peau », commente Camille, préposée aux soins. Enfin, c’est le tour de la spécialité de Royat, le bain de gaz, encore appelé carbothérapie thermale.

J’enfile d’abord un drap blanc comme pour une course en sac, puis je me ceins d’une seconde enveloppe plastifiée étanche que l’on m’attache à mi-thorax. Bientôt, le sac se gonfle donnant une sensation d’envol durant une vingtaine de minutes. « Le passage maximal de gaz à travers la peau a un effet relaxant et favorise la circulation sanguine », poursuit l’assistante. Ainsi détendu, nous sommes en mesure d’apprécier l’installation voisine dédiée au bien-être, le centre thermo-ludique, Royatonic, notamment équipé d’un spa thermal. « Le pari osé, engagé il y a quinze ans, est gagné, insiste Dominique Ferrandon. Royatonic accueille désormais chaque année plus de 180 000 visiteurs ».

 Une station pilote du microbiote

Nous filons quelques kilomètres plus au nord vers Châtel-Guyon. La façade des anciens thermes, illuminée le soir, à belle allure, mais la nouveauté réside dans la création d’Aïga resort,. « Aïga désigne l’eau en occitan » nous précise-t-on.

C’est un resort tout en un, rassemblant l’offre de soins, l’hébergement et la restauration. Autre particularité notable, il traite surtout les pathologies de l’appareil digestif et urinaire, en particulier le syndrome de l’intestin irritable, les maladies inflammatoires chroniques de l’intestin (MICI) ou encore les cystites à répétition.

cure thermale chatell guyon

La façade des  thermes, illuminée le soir @Yves Hardy

Pour ce qui nous concerne, nous nous contenterons d’une immersion complète du corps dans une piscine d’argile et d’eau thermale favorisant la décontraction musculaire er la souplesse articulaire. Mais nous visitons les différents services spécialisés. Arrêt à celui consacré à l’entéroclyse ou goutte-à-goutte intestinal. Il s’agit d’une instillation douce d’eau thermale dans le rectum. Elle autorise une action cicatrisante du colon grâce à la mise en contact directe de l’eau thermale avec la muqueuse intestinale.

« Une cure thermale, ce n’est pas une thalasso, ponctue notre accompagnatrice. Certains soins peuvent être contraignants ». Tous ont droit sans déplaisir à une « cure de boisson ». Elle met à profit, nous explique-t-on, les « qualités uniques » de l’eau thermale locale. « Sa concentration exceptionnelle en silicium et lithium, mais aussi en magnésium – la plus riche d’Europe – lui confère des propriétés anti-inflammatoires remarquables ».

Sur les bords de la Sioule

Plaisir de traverser la région secrète et sauvage des Combrailles pour gagner les thermes de Châteauneuf-les-Bains. Ce village ne compte que 300 habitants et accueille moins de 700 curistes à l’année. Bref, une station à dimension humaine, loin des « usines à curistes »…

La petite pépite ravira les amoureux de la nature. Ici, on peut se détendre dans le jacuzzi en surplombant les rivages préservés de la rivière Sioule, royaume des pêcheurs. Dans ce cadre naturel enchanteur, les cures thermales sont dédiées aux affections rhumatismales et aux séquelles de traumatismes ostéo-articulaires. Lieu idoine également pour un parcours de gym aquatique, synonyme de remise en forme. Alentour, tout invite à la balade. Pause bienvenue à la source Lefort dont les eaux sont riches en soufre et en fer. Elle draine un public de curieux depuis la Belle époque.

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Le jacuzzi surplombe les rivages préservés de la rivière Sioule@Yves Hardy

Lors de notre passage, un groupe de Clermontois s’adonne à un à bain de pieds dans le petit bassin. Dans le parc thermal voisin, toujours baigné par la Sioule, le décor cultive l’apaisement. Séquoias, cèdres, tilleuls et autres chênes semblent composer une ode à la tranquillité.

Les enfants pas oubliés

À la Bourboule, surprise, il faut se couvrir le visage du masque anti-Covid. « C’est le respect minimum dû à nos patients, explique Joffrey Chalaphy, directeur des Grands thermes, car nombre d’entre eux souffrent de fragilités des voies respiratoires ».

Les thermes sont en pleine rénovation, mais le bruit des travaux n’empêche pas l’accueil des curistes. Principales pathologies traitées, les voies respiratoires donc, mais aussi la dermatologie. Les enfants sont accueillis en nombre. Ils résident dans des maisons d’enfants. Les matinées sont consacrées à la cure, les après-midis à des activités culturelles, sportives ou encore à du soutien scolaire. « Nous sommes la première station pédiatrique de France », rappelle le directeur. Les plus jeunes peuvent être atteints de formes sévères d’eczéma ou eczéma atopique, de psoriasis, d’asthme ou souffrir des séquelles de brûlures.

De notre côté, nous testons les soins ORL. Un espace est consacré aux nébulisations, humages et aérosols, à raison de dix minutes pour chaque soin. C’est un fait, les particules d’eau thermale inspirées dégagent la muqueuse respiratoire. Des pulvérisations nasales plus sophistiquées peuvent également être prescrites. Comme dans la plupart des stations, un service premium, plus onéreux, assure la montée en gamme du site (spa, balnéothérapie,…). « Le curiste bénéficie d’un surcroît de confort, précise la responsable, mais les soins restent identiques ».

Invité à nous allonger sur un lit hydro-massant, propice à la rêverie, nous sommes proches de sombrer dans les bras de Morphée.

Le Mont-Dore, point d’orgue

Notre pèlerinage s’achève au Mont-Dore. Le bâtiment classé monument historique en impose, en particulier sa spectaculaire grande galerie de style néo-byzantin. « Le Mont-Dore, assure Loïc Mesure, le directeur, est considéré comme le second plus bel établissement thermal d’Europe, après Baden-Baden en Allemagne ».

Le parcours de la visite est parsemé de vestiges gallo-romains : ici, une colonne en pierre volcanique ; là, une lionne bien conservée. Le cadre somptueux a attiré de tout temps les personnalités. Ainsi George Sand a fréquenté plusieurs fois le Mont-Dore à partir de 1827. Aujourd’hui, le site reste le plus fréquenté d’Auvergne, accueillant quelque 9000 curistes en 2023. Ce bâtiment a beau être chargé d’histoire, Loïc Mesure ne néglige pas les coulisses.

cure thermale le mont doré

Le bâtiment classé monument historique en impose, en particulier sa spectaculaire grande galerie de style néo-byzantin @Yves Hardy

Petit tour par le service de lingerie qui a été internalisé. « Chaque jour, ce sont 2500 peignoirs et au total 2,5 tonnes de linge que nous devons traiter », raconte-t-il devant d’imposantes machines à laver et des séchoirs géants. Retour au décor prestigieux. Les sources d’eaux chaudes (César, la Madeleine…) ferrugineuses et riches en silicium délivrent leurs effets bienfaisants, notamment contre l’arthrose. Les soins thermaux, eux, se focalisent sur la rhumatologie – une demande de 80 % des curistes – et le drainage des voies respiratoires. Une originalité, la jolie salle des douches nasales gazeuses est ornée de plantes vertes, assez inhabituelles en ces lieux.
« Le CO² du gaz thermal qui n’est pas inhalé dans les fosses nasales est capté par les plantes », indique Loïc Mesure. Au pied du Puy de Sancy, le Mont-Dore s’affirme aussi comme une station verte…

 

 Pratique

° Y aller. En train, Paris (Bercy)- Clermont-Ferrand en 3h 30, puis voiture de location.

° Y loger. À La Bourboule, l’hôtel le Parc des fées : 04 73 81 01 77.

° Y manger. À Châtel-Guyon, le Chante-Grelet (04 73 86 02 05) ; à La Bourboule, le restaurant du casino (0473 65 54 45).

° La plupart des stations thermales sont ouvertes de début avril à fin octobre. Châtel-Guyon ne ferme ses portes que le 9 décembre 2023.

° La cure thermale « conventionnée 18 jours » peut être prise en charge partiellement ou totalement par l’Assurance maladie. Prenez contact avec votre médecin traitant.

° En savoir plus. Consulter le site www.auvergne-thermale.com, ainsi que ceux consacrés à chaque station thermale, sans oublier celui des « volontaires du bien-être extrême » : www.lesaccrosdupeignoir.com

Yves Hardy

 

Lire aussi : Ma mini cure thermale anti arthrose à Baraluc-les-Bains

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