Glenn Gould théâtre le splendid

 Glenn, naissance d’un prodige, au Théâtre Le Splendid

par Arielle Granat

« Glenn, naissance d’un prodige », nouvelle création d’Ivan Calbérac (« La Dégustation ») couronnée de 2 Molière, reprend au Théâtre Le Splendid jusqu’au 30 septembre. 

La courte vie de Glenn Gould, disparu en 1982 à l’âge de 50 ans, a inspiré à Ivan Calbérac une pièce extraordinaire, au diapason de la personnalité hors du commun de ce pianiste mythique, dont l’immense popularité dépassa très largement le public des amateurs de musique classique.

Parfaitement construite à coups de flash-back, la pièce retrace le parcours de cet enfant prodige, doté de l’oreille absolue, qui portera Bach à des sommets inégalés d’interprétation et de modernité, propulsant ses enregistrements des Variations Goldberg au top des ventes de disques à l’image d’une rock star, avant d’abandonner rapidement la scène pour se consacrer au studio, à la composition, à l’écriture et à la création de programmes radios et télés.

Pure tragédie shakespearienne, la vie de Glenn Gould est forgée par une mère dévorante, concertiste frustrée, qui force son enfant âgé de 3 ans à reconnaître d’oreille les notes qu’elle joue assise à son piano, sous peine de l’enfermer dans un placard s’il a le malheur de se tromper. Cette mère, toujours, qui noue avec son fils une relation quasi-incestueuse évoquée non sans humour par Ivan Calbérac dans une scène où le père de Glenn Gould, aimant et faible à la fois, reproche à son épouse de dormir « un jour sur deux » avec son fils alors âgé de… 15 ans, cette dernière lui expliquant qu’il faut bien soulager l’anxiété de l’adolescent qui n’arrive pas à s’endormir !

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Ivan Calbérac, face à cette histoire fondamentalement dramatique, réussit à y insuffler une bonne dose de comédie. A l’image de la séquence digne d’un film burlesque où Glenn Gould, hypocondriaque au dernier degré, se rend chez le facteur de piano Steinway pour essayer des modèles et entre dans un délire paranoïaque à la suite d’une légère amicale bourrade sur son bras par l’employé de Steinway, se concluant par un bras plâtré prétexte à l’annulation de ses concerts, qu’il ne supporte plus.

La distribution de la pièce a été célébrée par les Molières 2023, qui ont attribué à Thomas Gendronneau pour son incarnation de Glenn Gould et à Lison Pennec qui interprète sa cousine les prix de la Révélation masculine et de la Révélation féminine. Lors de la représentation à laquelle nous avons assisté, nous avons pu apprécier une distribution différente, et tout aussi remarquable. Dans le rôle de Glenn Gould, Nicolas Avinée impressionne, habité par la personnalité de l’artiste, son jeu évoque celui d’un Paul Dano. Pour incarner sa cousine amoureuse transie puis défaite, Agnès Claverie est parfaite, entre ingénuité et douleur, tandis que Raphaëline Goupilleau s’impose en mère castratrice et vampirique.

Porté par la remarquable scénographie de Juliette Azzopardi, qui nous transporte de Toronto à New York avec des tableaux évoquant Hooper ou une cinématographie évidente, « Glenn, ou la naissance d’un prodige » plaira autant aux fans de théâtre que de musique. Les deux seront comblés.

A.Granat

Glenn Gould, naissance d’un prodige
Théâtre Le Splendid
48 rue du Faubourg Saint-Martin
75010 Paris
Places à patir de 23 €.

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Photos@Fabienne Rappeneau

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