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Ménopause : la France adopte enfin une stratégie nationale

par Anne Bourgeois

25 recommandations pour briser le tabou

Le 3 avril dernier, nous interviewions la députée et rhumatologue Stéphanie Rist à la veille de la remise d’un rapport parlementaire inédit sur la ménopause. C’est désormais chose faite : ce 9 avril 2025, le rapport a été officiellement présenté à Catherine Vautrin, ministre du Travail, de la Santé et des Solidarités, à Yannick Neuder, ministre chargé de la Santé, et à Aurore Bergé, ministre chargée de l’Égalité entre les femmes et les hommes.

Objectif ? Mettre fin à des décennies d’invisibilité, en instaurant une politique publique ambitieuse, transversale, et structurée. Car il y a urgence : 17 millions de femmes sont concernées en France, et trop souvent livrées à elles-mêmes face à une étape de vie encore largement taboue. Le rapport ne se contente pas de poser un constat : il trace une feuille de route complète, articulée autour de trois grands axes. Son ambition ? Mieux informer, mieux soigner, mieux accompagner. Voici, dans le détail, les 25 recommandations qui pourraient enfin faire bouger les lignes.

INFORMER : DÉPASSER LE SILENCE, CHANGER LE REGARD

Première urgence : lever le voile. Le rapport recommande (recommandation n° 1) une vaste campagne nationale pour mieux faire connaître les symptômes de la ménopause, en s’appuyant sur les sites publics existants comme Ameli ou Santé.fr. Il propose (n° 2) de repenser en profondeur la communication publique pour en finir avec les récits anxiogènes ou stigmatisants, et valoriser cette période comme une phase d’évolution, pas de déclin.

L’école est aussi concernée : le rapport demande (n° 3) que les transformations hormonales — et donc la ménopause — soient intégrées au programme de SVT dès le collège. Parallèlement, Santé Publique France est appelée (n° 4) à concevoir dès 2025 une campagne dédiée, diffusée à travers des formats variés et inclusifs.

Le numérique devient un levier à part entière. Réseaux sociaux, applications FemTech, créateurs de contenu santé : tous doivent être mobilisés (n° 5), mais dans un cadre éthique et encadré. Le rapport insiste aussi (n° 6) sur la nécessité de pérenniser le financement des ateliers d’information de terrain dans les régions, en particulier dans une logique d’aller-vers. Enfin, le Planning Familial est invité (n° 7) à élargir son périmètre pour intégrer les enjeux liés à la ménopause.

SOIGNER : MIEUX FORMER, MIEUX ACCOMPAGNER

Le deuxième axe s’attaque à un angle mort du système de santé. Il appelle (n° 8) à une actualisation urgente des recommandations de la HAS, en intégrant non seulement le traitement hormonal (THM), mais aussi toutes les approches complémentaires : hygiène de vie, alimentation, compléments, TCC, phytothérapie, hypnose. La formation des professionnels de santé doit être revue : le rapport demande (n° 9) que la ménopause soit intégrée à tous les cursus, du médecin à la sage-femme, en passant par le pharmacien. Le « bilan prévention » proposé aux femmes de 45-50 ans devra aussi être enrichi (n° 10) de questions spécifiques, pour aider à repérer les signes.

Il faut une actualisation urgente des recommandations de la HAS, en intégrant non seulement le traitement hormonal (THM), mais aussi toutes les approches complémentaires

Autre avancée forte : la création (n° 11) d’une consultation longue, pensée comme un temps médical dédié pour faire le point en début de ménopause. Elle s’accompagnera, pour les femmes qui le souhaitent, d’un parcours individualisé coordonné (PIM), mobilisant médecins, kinés, diététiciens, ou encore sage-femmes (n° 12). Le rapport insiste aussi (n° 13) sur la nécessité d’adapter la prise en charge des femmes en situation de handicap, en intégrant la ménopause dans le dispositif Handigynéco. Il propose (n° 14) l’organisation d’Assises nationales de la ménopause dès l’automne 2025 pour fédérer les acteurs autour d’une stratégie publique cohérente. Enfin, la recherche est encouragée (n° 15) : bourses pour jeunes chercheurs, soutien aux start-up FemTech, et meilleure inclusion des femmes ménopausées dans les essais cliniques.

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Stéphanie Rist remet son rapport parlementaire sur la ménopause

TRAVAILLER : FAIRE DE LA MÉNOPAUSE UN ENJEU DE SANTÉ AU TRAVAIL

Le troisième volet met l’accent sur la vie professionnelle. Première étape : mesurer. Le rapport demande (n° 16) une étude nationale, confiée à France Stratégie, pour chiffrer le coût économique de la ménopause sur le monde du travail. Il recommande aussi (n° 17) que le sujet soit intégré dès 2025 dans le Plan Santé Travail 5 (PST5), et que des données croisées par âge et sexe soient enfin produites (n° 18).

Des outils pratiques doivent voir le jour, à commencer (n° 19) par un guide « Ménopause au travail », à destination des managers et des salarié·es. Un·e ambassadeur·rice « Ménopause et emploi » sera désigné·e (n° 20) pour porter ces enjeux dans les sphères publiques et privées.

Les conseillers France Travail devront être formés (n° 21) à la désinsertion professionnelle liée aux symptômes de la ménopause.

Les conseillers France Travail devront être formés (n° 21) à la désinsertion professionnelle liée aux symptômes de la ménopause. Le rapport recommande aussi (n° 22) des mesures très concrètes dans les bureaux : postes assis-debout, diagnostics internes, plans d’adaptation (n° 23). La visite médicale de mi-carrière à 45 ans (n° 24) devient un moment-clé pour aborder ces questions.

Enfin, les collectivités volontaires pourront expérimenter (n° 25) un congé ménopause, dans un cadre juridique sécurisé. Une manière, là encore, de donner à cette étape de vie la reconnaissance qu’elle mérite.

Un rapport qui fait date

Chaque recommandation est accompagnée d’un plan d’action précis, d’un calendrier, d’un pilote désigné et d’une évaluation budgétaire. Comme le rappelle Stéphanie Rist dans notre entretien du 3 avril 2025 : « La ménopause n’est pas une maladie, mais une étape de vie. Et cette étape peut être une libération. Il est temps de redonner aux femmes de plus de 50 ans leur pleine place dans la société. » Avec ce rapport, la France rattrape enfin son retard. Reste maintenant à transformer l’élan politique en actions concrètes, dans les cabinets médicaux comme dans les entreprises. Et à briser, une bonne fois pour toutes, le silence.

Le rapport est disponible ici https://stephanierist.fr/menopause-25-recommandations-pour-agir/


Les chiffres à retenir

Plus de 2 100 femmes ont répondu au questionnaire national, dont 1 380 témoignages librement recueillis.L

• 139 auditions ont été menées dans le cadre de la mission parlementaire.• 1 femme sur 2 ne parle pas de la ménopause à son partenaire.
• Moins de 3 % des femmes utilisent aujourd’hui un traitement hormonal.
• La périménopause peut débuter dès 45 ans.
• 20 à 25 % des femmes présentent des troubles sévères liés à la ménopause.
• Les maladies cardiovasculaires, accentuées après la ménopause, sont la 1ʳᵉ cause de décès chez les femmes.
• 40 % des femmes de plus de 50 ans subiront une fracture liée à l’ostéoporose.
Le Japon chiffre le coût de la ménopause à 11,57 milliards € par an. En France, aucune estimation officielle n’existe encore.
• 50 % des femmes françaises estiment que la ménopause a un impact sur leur vie professionnelle.• Le rapport encourage des approches non médicamenteuses : TCC, hypnose, phytothérapie, alimentation…



Le rapport parlementaire sur la ménopause ne se contente pas de proposer 25 mesures techniques. Il éclaire aussi les angles morts d’un débat de société majeur. En voici les lignes de force.

Ce que révèle aussi le rapport : six lignes de force pour une révolution silencieuse

1. Un changement culturel profondRompre avec l’image d’un déclin, sortir du silence, construire une narration valorisante : la ménopause doit enfin être reconnue comme une étape légitime de la vie.
2. Une stratégie interministérielle ambitieuseSanté, éducation, travail, collectivités, numérique : la mission appelle à une mobilisation transversale, à l’image des grandes politiques publiques sur le handicap ou les violences.
3. Un besoin urgent de donnéesPas d’évaluation économique, peu de statistiques croisées âge/sexe : le rapport insiste sur la nécessité de produire des indicateurs fiables pour agir efficacement.
4. Un regard critique sur la médecineProfessionnels peu formés, écoute insuffisante, traitements mal prescrits : la mission plaide pour une revalorisation bienveillante de la prise en charge.
5. Un enjeu d’éducation intergénérationnelleIntégrer la ménopause dans les cours de SVT, c’est sensibiliser filles et garçons dès le collège et redonner aux femmes de plus de 50 ans leur pleine place sociale.
6. Une politique d’accessibilité renforcéeAller vers les femmes éloignées des soins, diversifier les formats d’information (papier, numérique, visuel) : la politique doit toucher toutes les générations.

Source : Rapport parlementaire sur la ménopause, avril 2025

LIRE L’INTERVIEW DE STÉPHANIE RIST



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